À celui ou celle qui est de passage

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Je n'écris plus, je n'écrirai plus ici, ni ailleurs sur Internet, ou sur un ordinateur. Ou du moins pas en premier lieu, ni en deuxième. Peut-être des versions finales que je posterai de façon mensuelle ou hebdomadaire sur des blogs dédiés mais plus personne ne sera là pour lire. J'ai envie de travailler ce que je fais, de pouvoir raturer, changer, avoir enfin quelque chose de sale et d'illisible. Ce n'est pas pour ces conneries d'écrivain "sentir la feuille, la plume tout ça", ou alors pas seulement. C'est juste que je ne veux plus me contenter de textes pondus comme ça, sans style, sans idées, ça finit par se répéter. Toujours les mêmes thèmes, les mêmes choses, et ce format là est trop immédiat pour m'inciter à revenir sur ce que j'ai fait auparavant. Alors j'arrête, je recommence tout à zéro, comme pour le dessin, les études, tout ça, je prends une nouvelle direction. Ça peut sembler prétentieux, impossible ou une de mes nombreuses folies volontaires mais non pourtant. Je vous salue mesdames, mesdemoiselles et messieurs, merci pour ceux qui ont eu le courage de lire ce que j'avais fait, mes excuses à ceux qui sont arrivés là par hasard en espérant lire tout leur saoul, si je vous croise vous pourrez lire mon carnet, promis.

Je vous embrasse,
Adieu.

Florent

Cliquetis

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Un bruit de crécelle très léger, la petite boîte à musique se met à chanter. Des notes toutes douces, une musique charmante. Dans l'enveloppe doucereuse de la nuit, Émilie s'endort, sentant encore sur son front l'empreinte des lèvres de sa mère. Émilie a huit ans. Comme toutes les filles de 8 ans elle aime les princesses et les chevaux, se coiffer, veut se maquiller comme les grandes et met les talons hauts de maman pour jouer à la maîtresse. Émilie va à l'école, et apprend ses leçons, ça l'ennuie des fois mais elle est plutôt bonne élève. Émilie aime en secret Louis. Louis est plus grand, il est en CM1 et il a neuf ans. Louis joue pas au foot, il reste dans son coin dans la cour de récré et il lit. Il est ami avec Nathan, qui lui joue au foot et est super fort et est amoureux d'Émilie en secret. Émilie rêve. Elle s'imagine dans un monde féerique où elle serait emprisonnée par M. Brochard, l'instituteur pendant que Louis viendrait la sauver. Ensuite ils se feraient un bisou sur la bouche comme dans les dessins animés et ils iraient jouer à la dînette dans le grand château du papa d'Émilie. Elle se réveille, une douleur aiguë au ventre, puis elle sent un truc froid contre sa gorge qui lui fait mal, et quelque chose de chaud coule le long de son cou. Elle se rendort doucement. Dans la pénombre, un sourire carnassier éclairé par la veilleuse se reflète sur une lame de couteau qui disparaît dans une poche intérieure. Elle voit les étoiles, et ne voit plus rien. La petite boîte à musique s'arrête de chanter, dans un cliquetis tout doux.

Pisugtooq

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Combien de temps ça fait que je marche ? J'ai vu le soleil se lever et se coucher, sans fin, dans un ballet continu. Ça fait très longtemps que c'est comme ça, seulement je m'en rends habituellement pas compte, je dors. Plus maintenant, je ne dors plus. Je marche pour fuir, j'ai oublié ce que je fuyais mais ça devait être grave pour que je m'arrête définitivement de dormir. Peut-être que ça voulait me tuer ? Je sais plus, j'ai juste des passages flous dans ma tête, quelqu'un qui se retourne mais pas moyen de me rappeler à quoi il ressemblait.
À me nourrir de bestioles comme ça je sais pas si je vais rester en bonne santé très longtemps. Mais bordel pourquoi je marche comme ça ? Je me sens même pas fatigué. J'ai envie de m'arrêter mais j'y arrive pas. Il y avait de la lumière aussi, partout, des colonnes immenses de lumière. Et du bruit je crois. Oui, un bruit assourdissant en y repensant, et qui ne s'arrêtait jamais, jamais, jamais. Alors je crois que c'est ça que j'ai fui, le bruit et la lumière fausse, parce que ça voulait me tuer. Oui, et c'est pour ça que j'ai arrêté de dormir, pour pas que ça vienne me retrouver dans mon sommeil. Un bruit assourdissant et du mouvement. Du mouvement autour de la lumière, du mouvement qui s'associait au bruit.
Je ne me rappelle plus. J'ai tendance à oublier certaines choses, excusez-moi de ne pas pouvoir vous aider. Combien de temps ça fait que je marche ? Je dirais des siècles, des millénaires, je ne sais plus, je ne me rappelle plus. J'ai tendance à oublier certaines choses, excusez. Je quitte un monstre sans fin pour m'enfoncer dans un rouage perpétuel de questions et de pas. Et où je vais ? Je me rappelle plus, je crois que je veux aller loin mais je sais pas trop où. Je crois que je voudrais aller dans les étoiles, mais je suis pas sûr.

Bonne année !

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C'est amusant comme ça va vite et lentement en même temps. Voir les objets, les choses, le paysage défiler et puis le temps surtout. Se rendre compte que malgré l'extrême vitesse à laquelle ça va, on a encore le temps de s'accrocher à des détails qui en appellent d'autres et finissent au final par faire une grande toile, immense, mélangée de ce que vous vivez et de ce que vous avez vécu. Apercevoir une femme à la fenêtre, se rappeler de la courbe en velours d'une épaule le matin. De l'odeur du café et du pain grillé, de la petite lumière dorée qui vient vous réveiller. Je regrette un peu ces moments là. C'était silencieux et empli d'une musique très douce à la fois. Je me rappelle de la pluie, je me rappelle la peur quand tu rentrais trop tard, peur qu'il te soit arrivé quelque chose ou que tu ne reviennes plus. Et finalement tu rentrais, avec un sourire et des tonnes de papiers sous le bras en me racontant ta journée et je me sentais idiot. Bien sûr que t'avais un travail prenant. Apercevoir au loin une voiture qui arrive, se rappeler de la première qu'on a eu. Elle était pas bien belle, ni bien puissante mais elle marchait et aurait pu m'emmener au bout du monde. Je me sentais puissant à son volant, dévorant la route les cheveux au vent de la fenêtre grande ouverte. Et puis un jour, elle m'a ramené chez moi et elle est tombée en panne juste devant mon garage pour ne plus jamais fonctionner, tant pis.
C'est bizarre comme toutes ces choses étrangères vous rappellent ce que vous êtes. Un enfant dans sa chambre qui joue au deuxième étage d'en face. J'aurais aimé avoir des enfants, je les aurais accompagné dans leurs découvertes, pouvoir le prendre dans mes bras quand il est fatigué, lui apprendre des choses et le voir grandir en découvrant le monde et les différentes émotions humaines. Il n'y a rien au premier.
C'est étrange, en me jetant de ma fenêtre du septième je ne pensais pas voir tout ça.

trois
deux
un

Je ne pourrai jamais m'amuser les dimanches, car je n'arrive pas à oublier que le lendemain j'ai école.

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Je m'appelle Vincent, j'ai pas choisi, c'est ma mère qui m'a appelé comme ça avant de mourir.
J'aime bien. Il y a des gens qui ont eu une enfance malheureuse, et d'autres plus chanceux. Moi je sais pas trop, d'un côté j'ai grandi dans un orphelinat, de l'autre côté je m'en échappais chaque soir pour aller découvrir le monde. Parce que je vous ai pas dit mais quand j'étais petit, j'avais des ailes aux pieds. Je l'ai jamais dit à personne, parce que personne ne m'aurait cru, d'ailleurs les médecins l'ont même pas noté à la naissance alors si des gens qui ont fait plein d'études ne veulent pas y croire en m'ayant vu tout nu je me fais pas d'illusions sur les autres qui n'ont vu que mes chaussettes.
Maintenant je les ai plus.
Madame Lise dit que c'est parce que je grandis, on vole moins haut au fur et à mesure. C'est la seule à qui je l'ai dit en fait je crois. Parce qu'elle a toujours été gentille avec moi, et que je savais qu'elle rigolerait pas. Elle me regardait juste d'un air fasciné et notait des fois des choses sur un papier. Les autres enfants me laissaient relativement tranquilles et voulaient pas trop jouer avec moi, ils disaient que j'étais bizarre; et j'suis content qu'ils m'aient laissé tranquille. J'aimais pas leurs jeux. Ils jouaient à la guerre. En gros vous preniez des batons, vous visiez quelqu'un avec et vous criiez "Pan pan" et l'autre faisait semblant d'être mort. C'est horrible comme jeu, faire semblant de prendre la vie à des gens. Ils m'effrayaient avec ces trucs. Et puis les autres étaient méchants. Si vous faisiez quelque chose qui ne leur plaisait pas, ils rigolaient et vous embêtaient sans arrêt. Dans ces moments là je me réfugiais dans un coin de la cour de l'orphelinat et je fermais les yeux très forts pour que mes ailes se mettent à battre et m'emmènent loin d'ici. Des fois ça marchait et je me retrouvais dans un monde rempli de lions en costumes qui fumaient doucement la pipe en parlant de philosophie avec des hippopotames en tenue de soirée, des mondes souterrains immenses à explorer et des insectes géants avec qui je pouvais faire des courses. Je revenais souvent dans le vrai monde dans un lit. Il y avait madame Lise qui me regardait d'un air bienveillant et des fois des tas d'autres monsieurs que je ne connaissais pas qui écrivaient dans des carnets aussi. Et les enfants avaient un peu peur de moi dans les jours qui suivaient, un garçon qui vole c'est pas courant c'est vrai.

Maintenant je ne les ai plus. Madame Lise dit que c'est parce que j'ai grandi. Je m'élève un petit peu du sol, d'un mètre ou deux mais c'est tout. Et les autres ont toujours peur de moi, alors qu'il n'y a pas de raison, je ne vole plus assez haut pour franchir le mur d'enceinte de mon nouvel orphelinat.